Au fur et à mesure que j’avançais dans l’histoire des familles Van Cleef et Arpels, j’en suis venu à me poser des questions devenues évidentes.
J’ai découvert cette Aryanisation des entreprises françaises, dirigées contre des gens de confessions Israélites, mais aussi concernant des gens dont le seul tort était d’avoir eu des parents ou des grands parents israélites.
Leur nationalité : Juif Français…. et par opposition, à d’autres qui tenaient à affirmer qu’ils étaient de « bons français, catholiques et Aryens »
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Certains expliquaient à l’époque - tel Hitler traumatisé par la défaite de 1918, que la "juiverie internationale" était responsable des malheurs de l'Allemagne Mais les français – de Vichy - sous la responsabilité du Maréchal Pétain ont largement repris les idées d’Hitler.
Pour rappel le calendrier fut le suivant :
27/9/1940 : Ordonnance allemande sur le statut des juifs, recensement des juifs, écriteau sur les magasins repris par les juifs.
3/10/1940 : Premier statut des juifs, les citoyens juifs français sont exclus de la fonction publique, de l’armée, de l’enseignement, de la presse, de la radio et du cinéma, ils sont aussi exclus des professions libérales.
4/10/1940 : Les préfets peuvent interner les étrangers de race juive dans des camps spéciaux ou les assigner à résidence.
7/10/1940 : En zone occupée « Aryanisation » des entreprises.
29 mars 1941 : Création du commissariat général aux questions juives (CGQJ) réalisé par des Français du gouvernement de Vichy.
21/7/1941 Aryanisation en zone libre.
Un récent rapport commandé par Mr Alain Juppé a fait le point des spoliations et des restitutions
Ce rapport est précis, mais statistique, et en étudiant l’histoire de la Maison Van Cleef et Arpels, j’ai eu le désir d’aller plus loin pour comprendre.
Comprendre ce qui était arrivé, mais aussi essayer de comprendre ce qui était arrivé aux autres entreprises de Bijouterie Joaillerie Françaises.
J’ai cherché et trouve que les archives nationales avaient gardé ces dossiers , par leurs services j’appris que le n° du dossier de VCA était le 156 et qu’il faisait partie du fond AJ/38, ne serait ce que le temps pour moi de sonner aux bonnes portes, ces services équipés d’Internet répondirent rapidement, je demandais si une copie pouvait m’être remise mais Plus de 700 pages et 218 rien que pour VCA, on m’offrait la possibilité de venir a Paris consulter le micro film, mais quand on habite près d’Avignon !!!
Ces services eurent la gentillesse de me proposer une copie du Micro Film, ce que j’acceptais, mais il me fut adressé la copie du fichier AJ/38 3046 dans lequel j’eu la surprise de trouver VCA, mais des diamantaires, des joailliers comme la maison « Clerc » place de l’Opéra, des épiciers, des tailleurs, et même des charcutiers !!!!!
Pour ceux, très nombreux qui ne savent pas ce qu’a été l’Aryanisation !
En décembre 1940 le gouvernement de Vichy crée un service chargé de contrôler le processus d’ « aryanisation » des biens juifs, le « Service du contrôle des administrateurs provisoires » (SCAP), un service que les Allemands tentent de contrôler pendant les quatre ans de l’occupation.
A l’automne 1940 les décrets allemands et les lois françaises définissent qui doit être considéré comme « Juif », imposent aux Juifs le recensement et interdisent un grand nombre de professions aux Juifs. Ils définissent également quelles entreprises doivent être considérées comme « juives », imposent le recensement de celles-ci et décidé de les mettre sous administration provisoire. En décembre, après que allemands eurent indiqué à maintes reprises qu’elles désirent le déclenchement de l’aryanisation, le gouvernement de Vichy décide de créer un service chargé de l’aryanisation, le Service du Contrôle des Administrateurs Provisoires (SCAP), espérant garder ainsi le contrôle de ce processus et éviter la mainmise allemande sur l’économie française, Les fonctions principales de ce nouveau service sont d’abord de nommer les administrateurs provisoires (qui doivent être désignés pour toute entreprise considérée comme juive), et de sûr de contrôler leur activité.
Trois services allemands contrôlent un peu les responsables de Vichy:
La première section allemande chargée de l’aryanisation, le « Referat Entjudung », est intégré au sein du Militärbefehlshaber in Frankreich (MBF) et est dirigée par le Dr. Kurt Blanke, juriste, un expert de haute qualité avec une grande expérience professionnelle.
Blanke, Kurt (directeur des Affaires juives au département "économie" du Commandement militaire allemand en France) : après son internement, il est de nouveau à Celle. De 1948 à 1973, il y sera membre du conseil municipal, et de 1964 à 1973 il y occupera la fonction de maire.
Sa mission est entres autres de nommer des administrateurs provisoires (par exemple pour les grandes entreprises), et surtout de donner des conseils juridiques et de fixer ainsi le cadre d’application des mesures antisémites. Au début du mois de mai, le SCAP est également autorisé à nommer lui-même des administrateurs provisoires, si le chargé de mission du MBF n’y oppose pas d’objections. Les fonctions principales du service sont alors d’homologuer les « aryanisations », d’approuver en partie les nominations des administrateurs provisoires, de contrôler le travail du SCAP et finalement de fixer le cadre d’application des mesures de spoliation (uniformiser la politique de l’aryanisation).
Le "docteur" Blanke se charge des affaires importantes Dans le domaine de l’aryanisation, la mission principale de la « Treuhand » est chargée d’effectuer sur demande (entre autre par le chargé de mission du MBF auprès du SCAP) des expertises et des rapports sur des entreprises considérées comme « juives ». Pour se financer, elle est autorisée début avril à percevoir comme rémunération pour son activité de contrôle d’une affaire, une somme égale à la rémunération mensuelle de l’administrateur provisoire de l’entreprise en question. Grâce à ces sommes, la « Treuhand » finance entre autres une partie du personnel du service de Stenger. La « Treuhand » établit également un fichier des entreprises dites « juives » et de leurs administrateurs. Quand une entreprise est non seulement considérée comme « juive » mais aussi comme « ennemie », le contrôle de l’affaire est souvent laissé au SCAP, qui est en revanche chargé de verser le produit de la vente ou de la liquidation sur un compte de la « Treuhand » à la Barclays Bank de Paris. Coté allemand une vingtaine de collaborateurs (dont un directeur de service, seulement deux rédacteurs et un responsable du fichier), face à plus de 900 personnes dans les services d’aryanisation du côté français. (source centre-histoire.sciences-po.f)
Au début du mois de décembre 1940 avait été fondé le Service de contrôle des administrateurs provisoires (SCAP), installé dans les locaux réquisitionnés de la banque Louis-Dreyfus, place des Petits-Pères. Il était directement rattaché au secrétariat d'État à la Production industrielle, et avait à sa tête Pierre-Eugène Fournier.
Fournier, Pierre-Eugène (inspecteur des finances, dirige le service des administrateurs provisoires [SCAP] au Commissariat Général aux Questions Juives) : n'est pas inquiété à la libération. Président de la SNCF jusqu'en 1946, administrateur de la Compagnie du Canal de Suez. Dans sa notice du Who's Who de 1950, omet d'indiquer son passage à la tête du SCAP. Mort en 1972.
La création du SCAP répondait au désir de créer un organisme intermédiaire entre les administrateurs provisoires et les autorités allemandes, sans pour autant que son but proclamé soit différent de « l'exclusion de toute influence juive sur la conduite générale de la vie économique française », comme le remarquait Pierre Fournier (Philippe Verheyde, Les mauvais comptes de Vichy. L'aryanisation des entreprises juives, Paris, Perrin, 1999, p. 31). Le rôle des administrateurs provisoires devait être défini par le décret du 16 janvier 1941 relatif à l'application de la loi du 10 septembre 1940 prévoyant la nomination d'administrateurs provisoires des entreprises privées de leurs dirigeants (JO du 17 janvier 1941) et par la loi du 2 février suivant relative aux pouvoirs des administrateurs provisoires des entreprises privées de leurs dirigeants (JO du 9 février 1941).
Sur le territoire français, chaque « loi » décrétée par Vichy est la traduction en termes législatifs français d’une ordonnance allemande qui la précède de quelques semaines ou quelques jours seulement.
Il y a bien eu pillage de la France par les allemands, mais par dans le cas des entreprises françaises Aryanisées, car les entreprises on été reprises par de bons Français qui devaient préciser par lettre qu’ils étaient français Aryens depuis plus de trois générations et la plupart des dossiers que j’ai pu consulter, les repreneurs ajoutaient qu’ils étaient « Catholiques »
Et ils se bousculaient pour reprendre, le mécanisme était en accord avec des comptables, des conseillers juridiques, etc, de monter un dossier pour déprécier la valeur de l entreprise afin de la racheter a peu.
Que penser des quatre candidats qui se battent pour acheter le matériel d’une petite conserverie parisienne celle de Sylvain Leby 1 rue d’Hauteville à Paris, et qui l’emporte sur les trois autres ? Les conserveries « Capitaine Cook » !
De manière directe, seul le produit de l’amende du milliard, imposée aux Juifs par l’ordonnance allemande du 17 décembre 1941, profita aux Allemands bien que les avoirs juifs consignés à la CDC ne permirent pas de couvrir la totalité de l’amende et que l’UGIF dût emprunter les sommes correspondant à la première tranche auprès d’un pool de banques françaises.
On attribue à Xavier Vallat un mot terrible au printemps 1942, « il y a un déchaînement de convoitises »
Vallat, Xavier (commissaire français aux questions juives) : condamné en France à dix ans. Libéré par le ministre de la Justice, René Mayer, en décembre 1949 après 5 ans ; Ministre des affaires étrangères, Robert Schuman donne 20 000 Francs à Marie-Louise Vallat pris sur les fonds spéciaux du Quai d'Orsay en octobre 1949 ; bénéficie de la loi d'amnistie en 1953. Se replie sur les milieux d'Action Française et assure l'éditorial d'Aspects de la France. Dans les années 1950 et 1960, certaines de ses conférences sont interdites sous la pression d'organisations antiracistes (MRAP, Amitiés Judéo-Chrétiennes). Mort le 6 janvier 1972. Les notes sur le devenir des criminels jugés sont tirées de :
Ces « convoitises » qui ont été transformées en achat de parts d’entreprises ou d’entreprises ont permis à la plupart d’engranger des bénéfices considérables, mais la confiscation des biens juifs n’a en rien profité à la population française, au nom de laquelle on avait pris ces décisions.
Marrus et Paxton dénombrent cinq mobiles, types ou groupes d’intérêts divergents qui entrent en jeu dans le processus d’aryanisation :
· Le premier est la conviction fanatique de Vallat de servir la France et de devoir sauvegarder les biens juifs confisqués de la mainmise allemande.
· Le second est un « complexe d’intérêts allemands », entrepreneurs et MBF soucieux, pour les premiers, d’acquérir des avoirs français et, pour les autres, de perturber le moins possible le fonctionnement de l’appareil industriel français venant renforcer l’effort de guerre allemand.
· Le troisième groupe de pression est constitué par les grands corps de l’État, ministères chargés de l’économie en rivalité avec le Commissariat aux questions juives dans le contrôle du processus d’aryanisation.
· Le quatrième groupe est celui des administrateurs provisoires, parfois cupides, le plus souvent incompétents.
· Le cinquième groupe d’intérêts est celui constitué par les Comités d’organisation, prêts à « rationaliser » leur secteur en poussant à la liquidation d’un maximum d’entreprises juives.
Paxton en 1972 publie le livre qui le rendra célèbre Vichy France: Old Guard and New Order traduit en français en 1973 sous le titre La France de Vichy. Les thèses développées dans ce livre sont notamment étayées par les archives allemandes saisies par les autorités américaines. Il met alors en avant au travers de cet ouvrage la participation du gouvernement français à la Shoah (Wikipédia)
Dans le dossier Van Cleef et Arpels qui nous intéresse, nous allons étudier le déroulement des évènements, et après le débarquement américain, la Restitution aux survivants.
Je reprends ci-dessous des passages du rapport Mattéoli que je vous invite vivement à consulter le lien est en bas de cet article.
« Le gouvernement d’Alger avait préparé l’organisation des pouvoirs publics,
dans la France libérée. L’ordonnance du 21 avril 1944 avait placé à la tête
des différentes régions des commissaires de la République dotés de pouvoirs
Très étendus qui prennent leurs fonctions dès la Libération. En zone sud, immédiatement confrontés aux problèmes des spoliés à rétablir dans leurs droits, ils prennent très rapidement des arrêtés qui déclarent nulles les ventes et liquidations effectuées en application des mesures discriminatoires et prescrivent des mesures conservatoires.
En zone occupée, au contraire, à la notable exception de Bordeaux, Orléans et Angers, où Michel Debré ordonne la remise immédiate à leurs propriétaires des biens non encore liquidés ou vendus, rien de tel : les commissaires de la République semblent attendre des instructions pour agir.
Les commissaires de la République qui interviennent nomment une personne de confiance chargée d’abord de placer en lieu sûr les archives du CGQJ pour que ne disparaissent pas les traces des crimes de Vichy ; ensuite et surtout, comme à Marseille dès le 6 septembre, ils doivent
«S’engager [...] rapidement dans [les] restitutions de biens spoliés [et][...] faire remplacer les administrateurs provisoires indignes ou incompétents dont le choix n’était dû qu’à leur adhésion manifeste à l’idéologie du Gouvernement de Vichy»
Les étiquettes et les pouvoirs de ces personnes varient. À Montpellier, une délégation à la sauvegarde des biens des israélites fonctionne dès la mi-septembre; à Marseille, un service des biens spoliés dépend d’une direction du ministère des Finances qui détache un fonctionnaire des Douanes à ce poste; à Toulouse, un expert-comptable est désigné comme « liquidateur » de l’ex-CGQJ
…………………………………..
Quatre grands ensembles de spoliations et de pillages peuvent
être distingués. D’abord, les biens visés par la loi du 22 juillet 1941, c’est-à-dire les entreprises et immeubles aryanisés, et les actions françaises.
Au terme de ses recherches, la Mission aboutit à une estimation de la non restitution comprise entre 243 et 477 MF, en francs de l’époque.
Cette estimation prend en compte au titre de la spoliation initiale les 150 MF prélevés sur les comptes espèces pour l’amende du milliard, les titres vendus par les Domaines, les sommes consignées à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à la suite des ventes et liquidations d’entreprises et d’immeubles et celles détenues par les notaires. Il s’y ajoute les frais divers : honoraires et prélèvements d’administrateurs provisoires, frais de régie des Domaines, versements à la Treuhand.
Au titre de la restitution, l’estimation intègre les sommes reversées par les notaires ou les administrateurs provisoires, les déconsignations de la CDC et les remboursements effectués par l’État au titre de la loi du 16 juin 1948.
Les biens sont considérés comme restitués s’ils sont revenus dans les mains de leur légitime propriétaire, à la suite d’une décision de justice ou à l’amiable, ou encore quand leur vente a fait l’objet, après-guerre et souvent
renégociation du prix, d’un accord entre le spolié et l’acquéreur.
Au total, la spoliation rémanente représente dans ce domaine entre 5 et 10 % du montant total des biens spoliés en valeur, mais un quart de leur nombre total : les biens non récupérés ont une valeur sensiblement inférieure à ceux qui ont été recouvrés.
Deuxième approche des fonds spoliés, en partie incluse dans la précédente : les espèces et les titres bloqués dans les établissements financiers en application de l’ordonnance allemande du 28 mai 1941 et de la loi du 22 juillet 1941. Le blocage a porté sur 1 207 MF pour les espèces et 6 043 MF pour les titres. En extrapolant les conclusions d’une enquête partielle sur les comptes prescrits entre 1970 et 1998, c’est-à-dire:
les comptes fermés en raison de leur inactivité depuis trente ans, on peut estimer les fonds prescrits à 12 MF pour les comptes espèces et 133 MF pour les comptes titres, ce qui représente respectivement 1 % et 2,2 % des montants initialement bloqués. Mais, entre ces comptes prescrits et ceux qui donnent signe de vie après la guerre, il y a tous ceux sur lesquels nous ne savons rien et dont certains se sont éteints d’eux-mêmes, progressivement, avant le délai trentenaire de prescription et qui représentent le montant non négligeable de 1 957 MF. Afin de proposer une évaluation - mais on mesure l’approximation et la précarité du calcul - il a paru raisonnable d’admettre que les comptes éteints étaient ceux des
déportés ; comme cette catégorie représente de 3 à 11 % des titulaires de compte, nous avons considéré que 11 % de ces sommes, soit 215 MF, étaient tombés en déshérence. Les comptes de zone sud, qui n’ont pas été bloqués, ne sont pas compris dans ces évaluations, bien qu’il soit probable que certains sont tombés en déshérence. Les recherches faites par
les compagnies d’assurances conduisent à ajouter à ce montant une somme de 2 MF certainement due, mais avec un manque de connaissances tel qu’il ne serait pas sérieux de proposer une évaluation quelconque.
Troisième grand ensemble : l’argent et les objets pris aux internés.
Les Juifs qui étaient arrêtés et internés étaient, à leur arrivée dans les camps, dépossédés de l’argent liquide qu’ils portaient sur eux ainsi que des objets qui pouvaient avoir une valeur quelconque :bijoux, montres, etc. ……………………………………………..
Pour lire "l'aventure de ce tableau Aryanisé et restitué un peu tard.....
Rapport Mattéoli
Plusieurs photographies sont tirées du site de Monsieur Henri Thyssen
www.thyssens.com)
A propos du role de la Barclays Banque:
A propos du role de la Barclays Banque:
Journal The Guardian 1999
La honte de l'Holocauste chez Barclays
La honte de l'Holocauste chez Barclays
La succursale parisienne de la banque a
proposé les noms du personnel juif à ses maîtres nazis, écrit Antony Barnett
Dim. 28 mars
1999 02h40
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126
Lorsque les nazis ont envahi Paris en
juin 1940, de nombreux parisiens craignaient pour leur vie. Mais les
banquiers de la ville avaient d'autres préoccupations pressantes
?? comment protéger au mieux les intérêts financiers de leurs
institutions.
Personne ne savait qui
gagnerait la guerre, alors, en bons capitalistes, un certain nombre de
banquiers français ont décidé de s’occuper du numéro
un. Hitler? Churchill? Les affaires sont les affaires.
Les banques suisses
ont longtemps été accusées de collaborer avec les nazis, mais maintenant, The
Observer a dévoilé des preuves étonnantes de la façon dont le Troisième Reich a
été aidé par une institution financière beaucoup plus connue dans les rues
britanniques.
Des documents provenant
des archives nationales des États-Unis révèlent que de hauts responsables de la
banque Barclays basée en France ont «volontairement» fourni des informations
sur ses employés juifs aux nazis et ont aidé à organiser le financement de
projets destinés à soutenir la machine de guerre de Hitler.
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La banque a également
reçu un important dépôt en espèces du camp de transit de Drancy situé dans la
banlieue nord-est de Paris, à partir duquel des Juifs français ont été envoyés
à travers la frontière pour y mourir dans des camps de
concentration. L'argent a été pillé auprès des prisonniers juifs à
destination d'Auschwitz.
Les enquêteurs du
Trésor américain qui se sont rendus à Paris après la guerre pour démêler les
activités des banques en France occupée ont mis au jour une histoire de
collaboration intime entre les responsables français de la banque britannique
et les autorités allemandes.
On sait depuis quelque
temps que Barclays en France a saisi des actifs de clients juifs pour le compte
des nazis ?? la banque a accepté un règlement aux États-Unis de 2 millions
de livres sterling en décembre dernier avec des survivants de
l'Holocauste. Mais l'ampleur des activités de la banque en temps de guerre
en France n'a jamais été rapportée.
Malgré des preuves de
collaboration, The Observer a appris que le directeur qui dirigeait les
opérations françaises de Barclays sous l’occupation, Marcel Cheradame, avait
été retenu par son employeur après la libération et qu’il avait continué à
diriger la succursale jusqu’à sa retraite dans les années soixante.
Le rapport des
enquêteurs du Trésor américain a décrit Cheradame comme "très sensible aux
souhaits de l'administrateur allemand Hans Joachim Caesar".
Les enquêteurs
américains racontent comment la banque a tenté de se faire connaître par les
forces d'occupation. L'un des extraits les plus surprenants du rapport du
Trésor américain indique: «Un responsable de Barclays Bank (France) Ltd a fait
savoir à César que la banque comptait quelques employés juifs. César lui a
dit qu'il n'avait aucun intérêt particulier dans ce fait et a déclaré que la
banque devrait agir conformément au droit français. '
Les enquêteurs
américains ont conclu: "C'est un exemple des efforts non sollicités de la
banque pour s'aligner sur les vues allemandes".
Des éléments de la
collaboration entre Barclays ont été découverts lors de la recherche d'un film
de la BBC diffusé l'an dernier, intitulé Banking with Hitler, qui examinait le
rôle joué par les banques centrales européennes pendant la guerre.
Le rapport du Trésor
américain indique également comment les carrières de calcaire appartenant à la
famille de Wendel ont été placées sous la surveillance de l'administrateur
allemand après l'invasion de la France. La chaux est un composant essentiel
pour la production d'acier et la production totale de ces carrières. qui
avait atteint une moyenne de 6 000 à 7 000 tonnes par mois vers la fin de 1943
?? a été utilisé par la fonderie allemande, le Reichswerk Hermann Goering.
Les nazis ont ordonné
que la production atteigne 9 000 tonnes et l'administrateur allemand a estimé
que l'installation du nouvel équipement nécessaire nécessiterait un
investissement de 6 à 16,5 millions de francs.
Cheradame a mis à la
disposition de la carrière «toutes les facilités de sa banque, et en
particulier le capital requis pour les nouvelles installations proposées par
l'administrateur allemand».
Les enquêteurs
américains ont conclu: "Il ressort des lettres que Cheradame, un Français
travaillant pour une banque britannique, ne voyait aucun inconvénient à être
partie prenante à un projet ayant pour objectif final de prêter des fonds
britanniques à une entreprise française ayant pour objectif d'accroître la
production de la machine de guerre allemande. '
Janice Lopatkin, du
Holocaust Education Trust, a déclaré: "Je suis sûr que la direction de
Barclays était aussi choquée que nous le étions par les détails."
Les responsables de
Barclays ont affirmé qu'il n'y avait aucun contact entre son siège à Londres et
les opérations françaises pendant l'occupation nazie. Ils n'étaient donc pas au
courant des activités de son bureau de Paris.
Chris Duncan,
directeur des opérations bancaires internationales chez Barclays, a déclaré:
«Il faut comprendre que notre bureau de Paris n'était pas sous le contrôle du
Royaume-Uni pendant l'occupation nazie, mais sous le contrôle des
Allemands. Ils ont simplement gardé la plaque du nom de Barclays sur la
porte d'entrée.
Il a défendu Cheradame
comme "agissant de manière professionnelle" et a accusé les enquêteurs
du Trésor américain de produire un document "unilatéral".
Barclays n'a été
contraint de faire face à ses activités de guerre que lorsque la Commission
Matteoli en France a ouvert une enquête sur le comportement de banques opérant
dans la France occupée par les nazis.
La commission
découvrit que le caissier du camp de transit de Drancy, Maurice Keiffer, avait
déposé 290 000 francs au bureau de Barclays à Paris en juillet 1944, enlevés à
des prisonniers juifs se rendant à Auschwitz.
Il a également
constaté que les banques françaises ont saisi 3,5 milliards de vieux
francs? environ un demi-milliard de livres aujourd'hui? des Juifs au
nom des nazis.
Contrairement à
d'autres institutions, Barclays n'a pas nié une partie de sa sombre histoire et
s'est mis à rassembler des preuves à partir de ses propres archives. La
banque découvrit que, sur 16 000 comptes, elle comptait environ 335 déposants
en 1941 qui auraient pu être juifs.
Confronté à un procès
aux Etats-Unis, Barclays a créé en décembre un fonds de 2 millions de livres
sterling pour le remboursement des actifs détenus dans sa filiale française
pendant la Seconde Guerre mondiale et non récupérés par la suite par leurs
propriétaires légitimes. Ses actions ont été applaudies par des groupes
juifs.
La semaine dernière,
The Observer a révélé comment l'un des avocats américains qui avaient obligé
les banques suisses à proposer un règlement de 1,25 milliard de dollars aux
survivants de l'Holocauste se tournait maintenant vers certaines institutions
financières britanniques.
Ed Fagan, qui poursuit
également des banques allemandes pour un montant de 18 milliards de dollars au
nom des survivants de l'Holocauste, a pris pour cible le Lloyd's of London et
d'autres sociétés "anonymes" pour poursuite judiciaire.
National Westminster
est susceptible de figurer? sa succursale de Paris a été nommée par les
enquêteurs du Trésor américain et la commission Matteoli pour leur
collaboration avec les nazis.
Et Fagan n'en a pas
fini avec Barclays. Il affirme avoir encore plus de preuves de leur
conduite dans d'autres pays, et le règlement de 2 millions de livres ne suffit
pas. Il pourrait avoir un point. Après tout, il est apparu la semaine
dernière que l'ancien directeur général de la banque, Martin Taylor, avait reçu
4 millions de livres sterling l'année dernière.