Trois générations de Joailliers, qui vont marquer plus de cent années de la joaillerie française.
Dessins de Charles Templier, cliquez pour agrandir
D'excellents livres ont été écrit sur les "Templier" joaillier, qu'ajouter sur ces confrères, en dehors de la gratuité de la consultation de ce blog et de l'apport d'articles de presse des époques concernées ? Mais je préfère après avoir lu les textes des autres et me faire ma propre idée.
Le premier des Templier qui ait laissé une trace, se nommait à l'état civil, Pierre Charles Joseph TEMPLIER, il est né en 1821 et décédé en 1890. En 1846, il avait épousé en 1846 Marie Jeanne Eulalie LIORE (1827-1890) qui était aussi Bijoutière. Charles s'est installé en 1849 au 15 rue de la Tixanderie à Paris. Les très beaux dessins ci-dessus sont de lui, et ont été exécutés en 1850.
En 1855, il déménage rue Michel le comte, nous savons peu de choses de Pierre Charles Joseph TEMPLIER, il avait cependant un frère Jean Hippolyte Templier né en 1854 qui était fabricant…d'éventails.
Bien qu'il décède en 1884 le poinçon de Charles templier a servi jusqu'en 1897, de plus le sigle choisi "Dépileur" est étonnant.
Poinçons relevés aux noms de Charles et Joseph Templier
Poinçon de Charles Templier son poinçon ayant été biffé plusieurs fois pour usure le 12/12/1929 est remplacé par le symbole " Un templier avec son manteau "
Charles eut un fils qui lui succéda en 1885, Paul Templier, déclaré a l'état civil le 17 avril 1860 comme, Jean Paul TEMPLIER, comme son père il était bijoutier et même Joaillier.
1885 à la mort de Charles, Paul Templier, son fils, prend en charge le fonctionnement des ateliers
Cette chimère est de Paul Templier et date de la fin du 19 ème siècle, il va s'installer au 3 place des victoires,
Contrairement à la date indiquée"1900" je pense que cette publicité est postérieure pour la bonne raison que Raymond Templier, son fils, avait 9 ans en 1900, c'est en 1919 que Raymond vient travailler avec son père.
Photo de Paul Templier
Ce pendentif de Paul Templier est daté de 1901, mais !!!!
Si vous cliquez pour agrandir l'image, vous verrez inscrit sur l 'écrin que Paul Templier était médaillé d'or à Paris en 1900 et Grand prix à l'exposition universelle de 1904, à moins que l'écrin ne soit postérieur, ce bijou est au moins de 1904.
En 1907, il est élu Président de la Chambre syndicale de la Bijouterie succédant ainsi à Louis Aucoc.
C'est en Mars 1908 qu'il est élevé au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur (et non 1906 comme dit dans le dictionnaire international du Bijou.
Dans son dossier de Légion d'honneur, on peut lire la longue liste d'expositions universelles auxquelles Paul Templier a participé et les nombreuses récompenses remportées, mais il était connu des 1900 pour son utilisation du platine au lieu de l'argent dans la joaillerie, mais aussi pour ses collections de bijoux en argent qu'il réalisait d'après les dessins abstraits de Théodore Lambert
1906 L'exposition
des Artistes Décorateurs (document d'époque)
Les grands premiers rôles du bijou sont absents. Mais nous rencontrons ici MM. Hirtz, Feuillàtre, Liénard, Archambaut, P. A. Mangeant, et l'architecte Lambert qui a composé pour la maison Templier des modèles intéressants.
On ne saurait trop louer, par exemple, la boucle de ceinture représentant un coucher de soleil dans un paysage. L'effet est obtenu par des moyens très simples qui n'ont rien de japonais et sont, comme les travaux des artistes d'extrême-Orient, néanmoins très synthétiques. Dans la corne MM. Henri Harara, Liénard, Becker taillent des peignes et des agrafes d'une grâce infinie. Ils les ornent de sujets délicats ou incrustent çà et là des perles d'un heureux effet. Une épingle à chapeau, de Becker, terminée par l'amusante silhouette d'un hippocampe est tout à fait séduisante. Le même artiste a sculpté dans le cèdre des statuettes symbolisant le Jour et la nuit. Elles ornent les angles d'une délicate pendule. Applaudissons, dans le bijou, l'abandon des motifs étranges qui firent naguère fureur chez les inventeurs de bijoux nouveaux. Le temps n'est pas très éloigné où ils offraient, aux élégantes des araignées ou des pieuvres dont les tentacules de pierres fines ou d'émail menaçaient d'endommager les chairs des belles et aventureuses personnes qui auraient osé s'en parer. Mais elles n'osaient pas. La période d'étrangeté, de nouveauté malgré tout, est passée. Le bijou nouveau est né, il est fait pour notre temps, il a abandonné son enveloppe fossile.
Pareillement, dans un livre datant de 1942, j'ai trouvé ce diadème daté de 1911, et attribué à Raymond Templier , Georges Fouquet en 1942 écrivait que :
"De jeunes artistes vinrent chaque année grossir le nombre de ces précurseurs : Maurice Dufrène, Paul Follot, Plumet, Victor Prouvé et bien d autres. L'idée de se grouper entre Artistes décorateurs se fit jour et ainsi fut fondée la société des Artistes décorateurs : C'était en 1901 Depuis cette date chaque année, une exposition réunit tous ces artistes et l'intérêt des amateurs et du public augmenta d'année en année. Parmi ces nouveaux venus, il en est qui s'occupèrent plus spécialement de bijoux et d'orfèvrerie, c'étaient Raymond Templier qui parut pour la première fois en 1911(il avait 20 ans NDLR), puis après la guerre, Gérard Sandoz, Jean Puiforcat, Jean Fouquet Bablet, etc."
Acte de naissance de Raymond Templier, né en avril 1891. Sa mère est la cousine du célèbre peintre et graveur Eugène Béjot.
De 1909 jusqu'en 1912, Raymond a étudié à l'École Supérieure des Arts Décoratifs à Paris. 1911, Raymond Templier se rend à Venise avant d'être diplômé en 1912.
En 1911, il expose à la société nationale des beaux-arts, au salon des artistes décorateurs, puis participe au salon d'automne et des tuileries.
Pendant la guerre de 1914-1918, il ne sera pas envoyé au front car il a de l'asthme.
Il entre dans la maison paternelle, mais n'est pas très intéressé par les productions de son père ; disciple du cubisme, il désirait appliquer ces idées cubistes au bijou.
1921 Dos d'un miroir de R -Templier
Cliquer sur toutes les photos pour agrandir
Broche cornaline et émail RAYMOND TEMPLIER, 1921
1922 R. Templier dans le Journal Fémina
Puis, 1925, année de "l'exposition des arts décoratifs modernes", le programme voulait "des objets relevant de conception nouvelles et inédites à l'exclusion de toute copie, de toutes inspiration des anciens styles"
Pour la bijouterie, il fut décidé qu'une exposition serait organisée préalablement. Elle eut lieu au Pavillon de Marsan, avec l'accord du Président de l'union centrale très porté vers les nouvelles formules.
Vint l'exposition, l'architecte Eric Bagge avait réalisé un décor féerique, pour des bijoux éblouissants, nouveaux, chatoyants, composés de pierres précieuses de grandes valeurs, comme de pierres moins précieuses ou même secondaires.
La Bijouterie Joaillerie Orfèvrerie fut l'une des plus grandes attractions de l'exposition, il y eut une foule de visiteurs qui défilèrent silencieux devant toutes ces splendeurs
1925 Templier dans la revue des Arts appliqués
P. Contreau écrira que "La manifestation d'Art qui a eu lieu en 1925 était une nécessité d'ordre social et économique.
Pendant quatre années, l'effroyable cataclysme (1914-1918) avait terrorisé les hommes, hanté les esprits des destructions possibles et réalisées, enfoui la vie, pour la mieux défendre, dans les fouilles souterraines à la manière des primitifs ancestraux. Et la victoire vint…."
Expo 1925 Boucheron dans le journal Vogue à la même époque
Expo 1925 Boucheron dans le journal Vogue
Louise Brooks, portant des bijoux de R . Templier, danseuse actrice de cinéma en 1925, elle tourne son premier film muet, Le Roi des mendiants (The Street of Forgotten Men)
Mauboussin en 1925 dans le journal Vogue
C'est dans le journal VOGUE, que Raymond Templier déclara en 1925 que
L'origine du style Art Déco, remontait aux bijoux et plus particulièrement aux dessins, de Paul IRIBE.
La nouveauté de ces bijoux n'était pas seulement leur grosseur, mais les contrastes osés des couleurs et l'association réussie de leurs tailles modernes formant des motifs géométriques, triangles, hexagones, trapèzes, qui rompaient avec la tradition.
1925, Broche en diamants, or blanc et laque noire (Primavera Gallery)
Elle représente deux motifs triangulaires imbriqués en platine et or gris 18K soulignés de laque noire, deux diamants taille brillant en sertissure et deux lignes de diamants taille brillant (TA).
Travail français signé Raymond TEMPLIER. Dimensions : 5,6 x 2,9 cm
1925 "Plaque de Front" par Raymond Templier, publication dans le numéro spécial de la revue "Le grand Négoce" organe du commerce de luxe Français
Il ne suffit pas d'inscrire dans une surface donnée des figures géométriques se coupant au petit bonheur. S'il n'était besoin que de juxtaposer des triangles multicolores, les devantures des marchands de couleurs constitueraient de vraies réussites. Appliquées par des imitateurs dépourvus de compréhension, les inventions les plus modernes aboutissent à des poncifs aussi détestables que les redites de l'académisme.
Quels que soient les moyens techniques employés, il existe des règles aussi absolues qu'immuables. Une création viable dans tous les domaines implique nécessairement l'abandon des formules, comme elle doit s'écarter du pittoresque et de l'anecdote.
Nous sommes sûrs, en exposant ces idées, de nous trouver parfaitement d'accord avec Raymond Templier. Car celui-ci s'est toujours affirmé de la race des créateurs. Les bijoux qu'il a exposés depuis vingt ans au Salon d'Automne, aux Artistes Décorateurs, à la grande manifestation de 1925, plus récemment à l'Union des Artistes modernes, ce groupe où ne sont admis que des artistes de choix, d'une incontestable personnalité, ont toujours témoigné que ce joaillier a été un novateur, apportant dans ses oeuvres un tempérament tout à fait original. Il est de ceux qui précèdent et non de ceux qui suivent. Ses plus récentes créations continuent et achèvent de le confirmer.
Qu'il s'agisse de bagues, de broches ou de pendentifs, l'arrangement des lignes dans les bijoux de Raymond Templier, tout en dérivant d'une imagination des plus libres et des plus fertiles, se réalise suivant une discipline de logique et de sobriété.
Vogue de 1925 qui cite Raymond Templier
Suite de l'article
Les diverses parties, les volutes, les courbes, les parallèles, les angles d'une part, le métal et les pierres d'autre part, s'appellent, s'équilibrent pour former un bloc d'une parfaite unité. Les bijoux de cet artiste possèdent un ensemble condensé, bloqué, et sont comparables à des statues dans lesquelles tous les membres se groupent sans qu'aucun d'eux se hérisse et s'écarte pour détruire l'harmonie générale. De même qu'une sculpture, les bijoux de ce joaillier peuvent être considérés sous tous les angles. Ils ont d'ailleurs été dessinés et traités, non pas uniquement de face, mais sous leurs divers profils, en perspective. Ils présentent une succession de plans, une combinaison de volumes, sur lesquels la lumière vient jouer. Ils ne brillent pas seulement par le scintillement des pierres, mais ils s'éclairent sur toutes leurs surfaces par les oppositions des régions lumineuses et des régions ombreuses. A ce point de vue, Raymond Templier a inventé une disposition de broche dont les ailes latérales se recourbent de manière à produire des reflets qui doublent la luminosité de cet objet précieux.
1925 journaux Vogue
Un des esprits les plus ouverts et les plus cultivés parmi les jeunes joailliers, M. Raymond Templier, me disait, le jour de l'ouverture de l'Exposition des bijoux « Quelle influence Paul Iribe aura eue sur l'art décoratif contemporain, et surtout sur la joaillerie ! On ne le dit vraiment pas assez
Rien n'est plus exact et nous pouvons, au début de cet article, noter le légitime hommage que commence à lui rendre sa génération.
Cette influence s'est exercée en deux sens.
D'abord le sens de la dimension. Dans tous les dessins qu'il faisait et qui montraient des mains de femmes, les bagues n'étaient faites que de grosses pierres. Puis le sens décoratif du bijou. Quand il commença d'en composer, qui devaient être vraiment réalisés, quand il fut en présence de ces matières, les plus somptueuses et les plus éclatantes qui soient, il vit tout de suite le parti qu'il pouvait tirer de l'assemblage et du mélange de leurs couleurs, par l'opposition des pierres opaques et des pierres transparentes, et il joua vraiment avec elles comme un peintre avec ses couleurs. Et encore très peu des dessins qu'il a faits ont pu être exécutés, de sorte que le public n'a pas connu la nouveauté et la variété de cette création. Mais je me rappelle l'enthousiasme que ces dessins et les quelques bijoux exécutés avaient soulevé chez les artistes : Anatole France, venu pour les voir avait passé une après-midi à les regarder, à les prendre dans ses mains sensibles, si bien accoutumées au contact des belles choses.
Mais qu'un artiste comme Iribe, ayant eu cette conception du bijou, ait souhaité la réaliser, il n'y a là rien d'étonnant. Il n'était arrêté ni par le prix, ni par les difficultés techniques, ni par des habitudes de clientèle. Il était d'ailleurs persuadé qu'aucun de ces éléments ne devait être un facteur d'insuccès, si ses bijoux plaisaient, car il pensait qu'ils répondaient à de nouveaux modes de parure. Et ceci était vrai, bien qu'un peu prématuré.
Mais que des joailliers, qui ont tous les risques que l'on connaît, n'aient pas hésité eux non plus à composer, à inspirer, à choisir ou à exécuter tant de bijoux magnifiques, non seulement d'une telle somptuosité, mais d'un tel art et d'un si grand goût pour la plupart, c'est un des efforts les plus étonnants et les plus achevés de cette Exposition, qui en compte pourtant un si grand nombre.
Car ceux-là, qui ont des responsabilités financières considérables, n'ont pas craint de faire spécialement des bijoux répondant à une conception toute moderne avec plus d'audace encore peut-être que n'en témoignaient les bijoux composés par Iribe. Dans les Expositions d'autrefois, 1878, 1889, 1900, où les joailliers parisiens ont toujours témoigné à la fois de leur goût, de leur hardiesse et de leur capacité financière, ils employaient les pierres précieuses comme on les taillait couramment. Leur risque, au cas où le bijou non vendu allait comme on dit « à la casse H, ne portait que sur la "façon" assez peu considérable. Dans ces temps heureux. A l'heure actuelle ce risque seul est décuplé et il faut y ajouter celui qu'engage la taille spéciale des pierres précieuses, pour qu'elles donnent leur effet particulier dans la proportion exacte où l'a voulu le dessinateur du bijou.
Et c'est une des grandes nouveautés du bijou moderne que le travail du lapidaire.
Le diamant n'est plus seulement rond, ovale ou rectangulaire, comme autrefois. On le taille maintenant dans toutes les formes, et toutes les dimensions, ce qui crée des effets si curieux et si particuliers, avec des lignes, des triangles, des hexagones, des trapèzes même. Les autres pierres aussi prennent toutes les formes ce qui permet des compositions de lignes et de couleurs tout à fait inattendues et le plus souvent très harmonieuses.
Les bijoux prennent, de cet emploi de pierres, une fantaisie, une variété qu'ils n'avaient jamais atteintes. D'abord ils sont redevenus des bijoux, c'est-à-dire une parure et l'accompagnement
Dessin d'un pendentif de Raymond Templier, pour l'exposition de 1925, ce dessin ainsi que beaucoup d'autres peuvent être découverts dans les collections du ministère de la culture (il y 45 pages de pièces et dessins conservés au Musée des Arts Décoratifs)
Dessin d'une broche de R Templier pour l'exposition de 1925, don de Raymond Templier en 1967 au Musée des Arts Déco
1926 compte rendu d'une exposition dans le journal l'Europe Nouvelle
1925 pour l'exposition des arts déco, Templier créée cette broche en diamants, laque verte et gris foncé, elle est signée (Primavéra Gallery) C'est a rapprocher de la page, du journal "la renaissance de l'art" au-dessus, ou figure cette broche
J'arrive à Raymond Templier, dont le champ d'action est confiné dans le royaume lilliputien du bijou, mais qui, dans ce précieux microcosme, n'en a pas moins appliqué les mêmes principes constructifs et décoratifs que ses co-exposants dans leurs grands ouvrages. Si l'on mesure le mérite à la hardiesse du renouvellement, — et pourquoi non ? — Raymond Templier nous apparaît aussi dégagé du passé que Legrain ou Puiforcat. Il ne procède, lui non plus, d'aucune des formules plus ou moins modernes que nous avons vues fleurir au Grand Palais. Des plans des lignes, des compartimentages... Plus de grosses pierres dont l'effet facile accroche le regard aux dépens de la monture. Plus d'emprunts aux formes naturelles ou même architecturales. Le bijou de Raymond Templier est une tablette, aux contours stricts, inscrivant un polygone intéressant sur le corps féminin. Nul relief. Une mosaïque. Dans la plaque d'or du pendentif, le ciseleur tranche des compartiments qu'il remplit d'émail ou qu'il garnit d'un semis de brillants. Le chaton des bagues s'érige en polyèdres hardiment coupés, dont le volume s'allonge le long du doigt. Technique, matière, coloris, tout est personnel et neuf, sans verser dans l'excentricité.
Quelqu'un a écrit que l'Exposition de 1925 avait enterré l'art décoratif. C'est possible. Mais de beaux volumes développés dans l'espace, des surfaces nettes et reposantes, des jeux agréables de plans et de lignes suffisent à satisfaire notre goût de sportifs épris de décision et, de clarté. Et ceci est encore de l'art. Laissons l'épithète de « décoratif » aux Ecoles nationales où l'on cultive, comme une plante potagère, l'ornementation « moderne », déjà plus poncive que les styles qu'elle prétendait remplacer. La bonne leçon, c'est celle qu'on peut tirer d'ouvrages faits de main d'ouvrier, comme à l'Exposition Barbazange, celle que nous donnent des Chareau, des Dominique, des Puiforcat, des Legrain, des Raymond Templier, qui savent ce qu'ils veulent, et qui vont droit au but sans se soucier des puériles querelles de groupes et des vaines parades de la foire sur la place.
Qu on le déplore ou non L'art applique — et même l'art tout court — se développe de plus en plus dans le sens de l'universalité. Les particularismes de provinces se sont effacés depuis plus d'un siècle. Les jours des styles nationaux sont comptés. Nous marchons vers un art mondial, conditionné par un outillage universel. Mais cette unification s'étend aussi aux catégories, malgré, les différences de techniques et de matières. Pour un clairvoyant, les tissus de Rodier, les reliures de Legrain, les bijoux de Templier, les vitraux de Barillet, obéissent aux mêmes influences, proclament les mêmes formules. On aimerait revoir une exposition en 1950. HENRI CLOUZOT.
1927 dans "le Bulletin de l'effort moderne"
En 1927 dans la revue de l'Art.
Il existe dans les arts appliqués un Groupe des Cinq, basé, comme celui des Six en musique, sur des affinités intellectuelles qui transparaissent dans les oeuvres. Un goût commun de la recherche, et d'une recherche dirigée vers cette modernité qui s'apparente à l'esthétique de l'automobile et de l'avion, a rassemblé Dominique, Pierre Chareau, Legrain, Jean Puiforcat, Raymond Templier. Les galbes de Dominique ont cette grâce sévère, mais intensément harmonieuse d'une belle carrosserie. La ligne d'ingénieur, d'une pureté abstraite, s'infléchit à propos avec une élégance qui la rend sensible et vivante. Chareau est plus sec, plus dogmatique, mais ses meubles sont toujours d'une forte ordonnance. Il faut aussi pardonner quelques erreurs à un homme qui ne recule devant aucune hardiesse raisonnée et dont la forte personnalité a su guider l'art moderne
Il existe dans les arts appliqués un Groupe des Cinq, basé, comme celui des Six en musique, sur des affinités intellectuelles qui transparaissent dans les oeuvres. Un goût commun de la recherche, et d'une recherche dirigée vers cette modernité qui s'apparente à l'esthétique de l'automobile et de l'avion, a rassemblé Dominique, Pierre Chareau, Legrain, Jean Puiforcat, Raymond Templier. Les galbes de Dominique ont cette grâce sévère, mais intensément harmonieuse d'une belle carrosserie. La ligne d'ingénieur, d'une pureté abstraite, s'infléchit à propos avec une élégance qui la rend sensible et vivante. Chareau est plus sec, plus dogmatique, mais ses meubles sont toujours d'une forte ordonnance. Il faut aussi pardonner quelques erreurs à un homme qui ne recule devant aucune hardiesse raisonnée et dont la forte personnalité a su guider l'art moderne
1927 Expo de Templier à la galerie Barbazanges
La galerie existe toujours à Paris
En 1927, il est remarqué a l'exposition des Arts décoratifs et de l'Industrie pour ses lignes géométriques ainsi que sa manière d'associer l'émail et les diamants.
Pour ses boites et portes cigarettes Raymond faisait appel à Jean Trotain installé au 2 bis rue Vivienne.
Identification Nom Trotain Prénom Jean
Initiales JT
Adresse 2 bis rue Vivienne Paris
Profession Fabricant bijoutier orfèvre
Symbole (pour les orfèvres)
Un mortier lançant une fusée et une étoile au-dessus
Date d'insculpation (pour les orfèvres)
23/04/1924 Numéro du registre de la garantie (pour les orfèvres) 4109
Il cesse son activité le 4 février 1935 il réalisa aussi à partir de leurs dessins, des modèles pour René Boivin.
1928 : La publicité indique que les dessins sont de Raymond Templier, et les bijoux exécutés par Paul Templier et Fils au 3 place des Victoires à Paris, c'était au coin de la place et de la rue Etienne Marcel.
1928
Le poinçon de Charles Joseph Templier ayant été biffé en 1929 pour changement de raison sociale et remplacé en Paul et Raymond Templier père et fils : PR. T et un templier avec son manteau et sur l'agrafe C.T. (difficile de voir tout cela)
Madame Possémé, conservatrice en chef du patrimoine au Département « Art Nouveau, Art Déco, Bijoux » au Musée des Arts décoratifs, dans un interview à Valeurs actuelles déclara " L’Art déco s’inscrit d’abord dans le contexte des Années folles. « C’est une époque qui a foi en l’avenir, glorifie les progrès techniques. Les exploits aéronautiques, les courses automobiles sont autant de sources qui dictent la ligne des joyaux », poursuit-elle. S’il est un artiste qui incarne parfaitement ce style si épuré et géométrique qu’il paraît parfois abrupt, c’est incontestablement le joaillier Raymond Templier (1891-1968), surnommé “l’architecte du bijou”. Comme Jean Fouquet et Gérard Sandoz, il adhère en 1929 à l’Union des artistes modernes (UAM), présidée par Robert Mallet- Stevens. Tous créent d’étonnants bijoux inspirés par l’esthétique industrielle (bague moteur, broche roue dentée, bracelet roulements à billes…). Dans ce contexte économique délicat, l’Art déco a projeté le bijou vers la modernité avec finalement autant d’audace que d’ingéniosité.« En substituant l’or blanc au platine, les bijoutiers se veulent plus accessibles. Ils introduisent aussi des pierres fines moins coûteuses », rappelle Évelyne Possémé.
Les modèles peuvent être reproduits avec des variantes comme le modèle ci- dessus et celui-ci dessous
Diamants Platine et onyx noir
1928 Brigitte Helm actrice de cinéma muet pose avec des bijoux de Raymond templier,
L'actrice Brigitte Helm était l'héroïne du film "l'argent" de Marcel L'herbier, elle interprétait la baronne Sandorf, c'était une de ses bonnes clientes au même titre que Sacha Guitry, le couturier Jacques Lelong, le célèbre relieur Pierre Legrain qui était aussi illustrateur et ébéniste, Yvonne Printemps, les Dalsace qui avaient commandé a Pierre Chareau la célèbre maison de verre de la Rue Saint Guillaume.
Maison de verre: http://mag.lesgrandsducs.com/2014/09/maison-de-verre-paris/
L'actrice Brigitte Helm était l'héroïne du film "l'argent" de Marcel L'herbier, elle interprétait la baronne Sandorf, c'était une de ses bonnes clientes au même titre que Sacha Guitry, le couturier Jacques Lelong, le célèbre relieur Pierre Legrain qui était aussi illustrateur et ébéniste, Yvonne Printemps, les Dalsace qui avaient commandé a Pierre Chareau la célèbre maison de verre de la Rue Saint Guillaume.
Maison de verre: http://mag.lesgrandsducs.com/2014/09/maison-de-verre-paris/
Ci-dessous le diadème qu'avait réalisé R Templier pour le film" l'Argent" il avait associé l'ambre, le platine, diamants et émail noir.
Le diadème
Paire de clips d'oreille. Acier Onyx Diamants
Raymond Templier,1928, étui à cigarettes en argent, intérieur vermeil avec à l'extérieur une laque coquille d'œuf. Gravé à l'intérieur "11-10-28 à 11-09-28
Cliquer sur toutes les photos pour agrandir
Cette broche ça 1930, de Raymond Templier dite "Abeille" ornée d’un cabochon ovale en émeraude et or jaune, signée était mise en vente en 2012 entre 2500 et 3000, € elle a atteint 22600 € pour 26 grammes d'or, par le Ministère de Maître Thomas à Saint Amand les eaux.
Celle-ci fit encore mieux, 41250€ par Maîtres Clochon et Allardi à Drouot en 2012,
Une page dans "l'officiel de la couture" en 1928
Une bonne définition par Docantic: Raymond Templier, dont les oeuvres figurent aux Musées d'Art Moderne et des Arts Décoratifs de Paris et au Metropolitan Muséum de New York, est Chevalier de la Légion d'honneur depuis le 31/10/ 1938. Joaillier dessinateur Raymond Templier a été un des premiers a donner au bijou, Plus particulièrement que d'autres objets sujets aux fluctuations des modes, un style aux principes rigoureux mais qui n'excluent point la part de fantaisie voire de sensibilité nécessaire à un élément capital de la parure féminine. Raymond templier est à l'avant-garde de son temps : sa participation en tant que joaillier à la fondation de l'U.A.M. est pour le bijou une victoire, pour l'artiste une prise de position à laquelle il restera toujours fidèle.
Avec lui le bijou, quelles que soient ses dimensions, toujours minimes, est conçu volume dans l'espace telle une sculpture. Les lois qui commandent sa construction sont aussi absolues que celles auxquelles se soumettent l'architecte, le sculpteur ou le musicien.
Journal L officiel en 1928
Journal L 'Officiel en 1928
1928 Pendentif Platine et aigue marine
Résolument libéré de tout répertoire anachronique Raymond Templier demande ses thèmes, dépouillés de vains ornements, au langage esthétique de son temps riche, pour qui sait le comprendre, d'inépuisables ressources décoratives. Cette conception novatrice du bijou a entraîné l'artiste à s'engager dans le domaine des objets destinés aux compétitions sportives traités en sculpture, réalisés en argent, acier inoxydable.
Ils sont réduits à de savants jeux de volumes, de lignes propres à exalter, en un audacieux schématisme, le geste de l'athlète vainqueur.
1928 Étui à cigarettes
Raymond Templier était une figure importante du mouvement Art Déco. Il était l'un des fondateurs de l'UAM - Union des artistes modernes, avec d'autres figures importantes comme Pierre Chareau et Jean Puiforcat, Robert Mallet-Stevens, René Herbst, Hélène Henri en 1929
Le Krack de Wall Street de 1929 mais aussi la faillite du comptoir Lyon Alemand ont été fatals aux entreprises de bijouterie joaillerie françaises et à de nombreux designers de nos métiers. Il vous faut lire cet article que j'ai fait en 2011 :http://richardjeanjacques.blogspot.fr/2011/09/la-faillite-du-comptoir-lyon-alemand-et.html
C'est édifiant.
En 1930 c'est la dépression, la demande en tous produits se dirige vers le bon marché, les clients sont appauvris, mais nos fournisseurs aussi, et les designers vont préférer l'argent comme métal, d ou les nombreux modèles de Raymond Templier en argent.
La profession va abandonner les pièces uniques faites à la main pour des productions de masse réalisées à la machine.
En 1930 c'est la dépression, la demande en tous produits se dirige vers le bon marché, les clients sont appauvris, mais nos fournisseurs aussi, et les designers vont préférer l'argent comme métal, d ou les nombreux modèles de Raymond Templier en argent.
La profession va abandonner les pièces uniques faites à la main pour des productions de masse réalisées à la machine.
Mais avec la mode Art Déco, se développe les accessoires, par exemple aux environs de 1927, Cartier lance les Vanity et les étuis à cigarettes.
Les accoutrements de la mode style de vie Art déco de cette période sont représentés par une gamme d'accessoires par exemple en 1927, les Vanity et les étuis à cigarettes par Cartier; Jean Fouquet, et Raymond Templier créent des bijoux superbes. Jeanne Lanvin et Coco Chanel réalisent de chatoyantes robes de soirée ; et les photographies Man Ray et Edward Steichen incarnent l'élégance suprême des nouvelles tendances dans la mode.
Dans le Journal L Officiel des éditions Jalou en 1929 ce modèle de Raymond Templier réalisé pour madame Agnès
Madame Agnes avec son collier
C'est donc en partie a cause de la crise des années 30, que la plupart des "artistes-bijoutiers" de l'époque, n'étaient pas intéressés par des matériaux précieux. Templier a utilisé l'argent et l'or blanc, avec de la laque ou d'émail, généralement noire mais parfois verte. Il aimait les diamants pour leur effet, et les a utilisés pour leur éclat afin d'apporter la lumière à un bijou, autant qu'un architecte utilise des fenêtres Il a conçu des bijoux tout en diamants, mais il a aussi utilisé la couleur, généralement un vert profond, ou du corail, mais très peu.
Signé Raymond Templier
1929 Il transfère le siège boulevard Malesherbes
En lisant la presse de l'époque, on pourrait considérer qu'en 1930, Raymond Templier est à son apogée
.
Cet important bracelet de diamants est attribué par la maison Sotheby's à Templier (sans prénom) en 1930. Sotheby's le décrit ainsi « Les motifs ovales ornés de diamants de verrouillage circulaire coupées, mis au centre d'une série de liens cintrées, longueur d'environ 160 mm, poinçons français et la marque de fabricant de Templier. » 1930
Art et decoration.
RAYMOND TEMPLIER
Par l'équilibre et l'ordonnance de ses créations, il souhaitait de procurer aux autres des émotions du même ordre, de la même qualité et d'une aussi forte intensité.
Y parvient-il ? Certes. Je crois pourtant qu'il faut, pour les biens ressentir, des dons spéciaux et une loi qui n'est pas à la portée du premier venu. Mais la spiritualité du bijou de Raymond Templier séduit quiconque est capable de goûter le charme d'un art sobre, ramassé, présentant à notre oeil des combinaisons toujours nouvelles de lignes et de rythmes, une suite harmonieuse de plans et de volumes s'offrant aux jeux de la lumière. Un bijou de Raymond Templier ne se raconte pas, comme une peinture, une sculpture ou une oeuvre littéraire. Sa technique s'analyse. Ce bijou est avant tout, non pas le scintillement de l'or ou de mille feux, mais de l'ombre et de là lumière sagement calculées. La joaillerie est toujours dominée par le dessin et ce dessin s'ordonne du centre à la périphérie autour de points vitaux en quelque sorte. Jaillissant de ces points, la composition s'irradie et combine ses arabesques variées. Elle invite à participer à ses jeux les matières et la couleur : pierreries, diamants, émaux, sans parler de l'or, de l'argent, du platine, voire de l'aluminium.
Suite de l'article ci-dessus:
Que n'imaginerait-on pas avec de pareilles ressources ? L'excès précisément est à craindre. Et dans la couleur notamment, Raymond Templier s'en tient le plus souvent à une gamme de gris, de noir et de blanc. « La pierre, pensait Falize, n'a pas besoin d'un dessin savant. Ses feux dérangent les ornementations ». Raymond Templier est d'un avis radicalement contraire. Il ne souffrirait pas que la pierre vint déranger l'ordre qu'il établit. Ordre facile, pourrait-on penser. Oui, s'il suffisait de tracer sur une surface plane des figures géométriques, de faire comme dit Raymond Templier, « des abus de triangles dans un désordre sans volonté », pour créer une oeuvre intéressante et d'inspiration moderne. Que de suiveurs sont tombés déjà dans cette erreur qui avilit l'art d'aujourd'hui ! Nulle formule certes n'explique cet ordre et ne le dirige, mais une discipline s'y affirme, la discipline même de nos classiques, celle que nous propose cette phrase bien connue de Fénelon dans sa Lettre à l'Académie :
« Un ouvrage n'a une véritable unité que quand on n'en peut rien ôter, sans couper dans le vif ; il n'a un véritable ordre que quand on ne peut en déplacer une partie sans affaiblir, sans obscurcir, sans déranger le tout. Tout ornement qui n'est qu'ornement est de trop, retranchez le ».
N'est-ce pas la vertu profonde de ces principes éternels de la composition, d'autoriser, s'en réclamant pareillement, des oeuvres aussi dissemblables dans leur esprit et dans leurs formes que celles de notre temps et celles du XVII° siècle ?
Mais rien de tout ce que je pourrais ajouter ne dispense de regarder par soi-même et de juger en toute bonne foi un art si personnel dont je n'ai fait qu'analyser l'esprit général. Ce que je n'ai pu montrer que très imparfaitement avec des mots, les excellentes reproductions qui accompagnent ces lignes le feront comprendre plus clairement. Je m'efface devant elles.
Gaston Varenne
Ces dessins qui appartiennent à une collection privée dateraient de 1930, ils montrent ses idées novatrices, elles reflètent la caractéristique typique du style Art déco
Broche 1930 en platine, or gris, diamants, calcédoine (don manuel de Raymond Templier au musée des Arts Décoratifs en 1967)
RAYMOND TEMPLIER
Par l'équilibre et l'ordonnance de ses créations, il souhaitait de procurer aux autres des émotions du même ordre, de la même qualité et d'une aussi forte intensité.
Y parvient-il ? Certes. Je crois pourtant qu'il faut, pour les biens ressentir, des dons spéciaux et une loi qui n'est pas à la portée du premier venu. Mais la spiritualité du bijou de Raymond Templier séduit quiconque est capable de goûter le charme d'un art sobre, ramassé, présentant à notre oeil des combinaisons toujours nouvelles de lignes et de rythmes, une suite harmonieuse de plans et de volumes s'offrant aux jeux de la lumière. Un bijou de Raymond Templier ne se raconte pas, comme une peinture, une sculpture ou une oeuvre littéraire. Sa technique s'analyse. Ce bijou est avant tout, non pas le scintillement de l'or ou de mille feux, mais de l'ombre et de là lumière sagement calculées. La joaillerie est toujours dominée par le dessin et ce dessin s'ordonne du centre à la périphérie autour de points vitaux en quelque sorte. Jaillissant de ces points, la composition s'irradie et combine ses arabesques variées. Elle invite à participer à ses jeux les matières et la couleur : pierreries, diamants, émaux, sans parler de l'or, de l'argent, du platine, voire de l'aluminium.
R.T Templier , 1930 platine et diamants, vente Sotheby's
Que n'imaginerait-on pas avec de pareilles ressources ? L'excès précisément est à craindre. Et dans la couleur notamment, Raymond Templier s'en tient le plus souvent à une gamme de gris, de noir et de blanc. « La pierre, pensait Falize, n'a pas besoin d'un dessin savant. Ses feux dérangent les ornementations ». Raymond Templier est d'un avis radicalement contraire. Il ne souffrirait pas que la pierre vint déranger l'ordre qu'il établit. Ordre facile, pourrait-on penser. Oui, s'il suffisait de tracer sur une surface plane des figures géométriques, de faire comme dit Raymond Templier, « des abus de triangles dans un désordre sans volonté », pour créer une oeuvre intéressante et d'inspiration moderne. Que de suiveurs sont tombés déjà dans cette erreur qui avilit l'art d'aujourd'hui ! Nulle formule certes n'explique cet ordre et ne le dirige, mais une discipline s'y affirme, la discipline même de nos classiques, celle que nous propose cette phrase bien connue de Fénelon dans sa Lettre à l'Académie :
« Un ouvrage n'a une véritable unité que quand on n'en peut rien ôter, sans couper dans le vif ; il n'a un véritable ordre que quand on ne peut en déplacer une partie sans affaiblir, sans obscurcir, sans déranger le tout. Tout ornement qui n'est qu'ornement est de trop, retranchez le ».
N'est-ce pas la vertu profonde de ces principes éternels de la composition, d'autoriser, s'en réclamant pareillement, des oeuvres aussi dissemblables dans leur esprit et dans leurs formes que celles de notre temps et celles du XVII° siècle ?
Mais rien de tout ce que je pourrais ajouter ne dispense de regarder par soi-même et de juger en toute bonne foi un art si personnel dont je n'ai fait qu'analyser l'esprit général. Ce que je n'ai pu montrer que très imparfaitement avec des mots, les excellentes reproductions qui accompagnent ces lignes le feront comprendre plus clairement. Je m'efface devant elles.
Gaston Varenne
Audace des formes contrariées, des matériaux qui soulignent les contours, l'emploi d'émail, les pavages de diamants.
Ce dessin doit être des années trente, une de ses nombreuses épreuves qu'il n'a, ni daté, ni signé mais elle est revêtue d'un cachet
1930 HERBST et TEMPLIER, Bracelet métal traversant une plaque de verre
Salon de l'union des
artistes décorateurs
Que
l'exposition de l'Union
des Artistes Modernes nous permette de saisir des points limites, des
oppositions presque absolues de tendances, nous en retrouvons la
preuve dans l'ordre même du bijou. Selon qu'on tourne la tête à
droite ou à gauche, ce commentaire peut sembler éloge ou blâme.
Voyez par exemple la vitrine de Raymond Templier. Ici la technique
inspire la nouveauté. Exemple : ce bijou où les jeux de la lumière
sont déterminés sur la concavité d'une surface par d'invisibles et
minuscules réflecteurs.
1932. Coupe ou calice, le dessin est noté "argent et laque"
1933 Revue Art et décoration
M. Raymond Templier, un des premiers, a eu la belle audace de rechercher pour le bijou des formes nouvelles, en accord avec nos goûts et nos besoins. Voici sa réponse :II semblerait qu'un joaillier soit peu qualifié pour donner son opinion sur l'ornement et dire s'il est pour ou contre, car, en somme, le bijou est en grande partie, par définition, de l'ornement.
Le bijou a. à l'origine, un but utilitaire, magique, ou symbolique : anneaux de fiançailles ou de mariage, agrafes ou broches retenant la tunique, la robe ou la blouse. Mais du moment que le bijou ne se contente plus de la forme strictement utilitaire : épingle de nourrice par exemple, il devient en soi de l'ornement. A ce moment intervient le talent du dessinateur qui, ou bien recherche une forme épurée, ou bien recherche des ornements qui s'ajoutent à la forme et la détruisent en l'alourdissant.
1° L'art a évolué depuis plusieurs années en réaction directe contre le mouvement de 1900 qui n'était que littérature, dans un désir de netteté, de pureté, de simplicité, en horreur de tout ce qui n'est pas essentiel de tout verbiage, de tout lyrisme inutile. D'où provient à notre époque ce dégoût de théâtre dans ce qu'il a d'extérieur et de vainement lyrique, sinon du même sentiment ? Le cinéma a augmenté ce dédain des lyrismes trop prolixes, par les possibilités qu'il offre d'expressions rapides et profondes.
Ajoutez à cela les causes financières entraînant à la recherche d'objets simples et pratiques : appartements plus petits ; vie plus rapide entraînant à une simplification et à une rationalisation des gestes ; goût sportif de la performance précise sans bavures ; amour du geste sportif et du style de l'athlète aboutissant à une amélioration de performance : pas d'ornement, pas de volutes inutiles voilant la forme ; admiration pour l'élan de l'athlète la poitrine jetée en avant sur le fil de coton : les 100 mètres en 10'4". Que deviennent alors le paravent en simili faux Louis XV avec glaces biseautées ? Le surtout en argent avec balustrades et colonnettes et avec des jets d'eau en cristal éternellement figés ? Que deviennent les chimères d'or ciselé ? Les colliers d'or avec des roses ciselées ? Les partisans du retour à l'ornement ont certainement des stocks de modèles inemployés et fondus d'avance pour mettre une telle virulence dans leurs attaques.
2° Si l'on qualifie d'ornement ce qui est inutile et superfétatoire, j'espère que nous ne le reverrons jamais. La joie éprouvée dans l'équilibre des volumes, dans les proportions équilibrées, dans la vie gaie et sportive obtenue dans les intérieurs modernes nous préservera des surcharges et des ornements, et je ne crois pas, par conséquent, que son retour soit possible. Néanmoins il peut revenir sous l'influence de la mode : certaines personnes sont prises actuellement d'un amour passionné pour les horreurs louis-philippardes. Chacun trouve en art ce qu'il cherche et cherche ce qui répond à ce qu'il est.
1930 Art et décoration: Platine, laque noire et diamants
1933 "Art et Decoration" pendentif platine, diamants, laque noire.
Enfin Raymond Templier avait ouvré le dernier fleuron de cette succincte et significative couronne des arts décoratifs modernes en ciselant des bijoux qui, dans chacune de leurs lignes, rappelaient la précision nerveuse, la force sans lourdeur et le luxe sans ostentation de l'époque que nous vivons.Louis Gekkonnet.
Art & Decoration 1930 montre dame platine et diamants
Même modèle que ci-dessus en platine et diamants
1930 Broche platine et diamants, laque noire
Art et décoration broche platine et diamants
1930 Art & décoration Collier
1930 Art et décoration
1930 revues Art et Décoration
1930 Revue Art & Décoration
1930 Revue Art & Décoration
1930 Revue Art & Décoration
Raymond Templier demeure pour les bijoux un inventeur de premier ordre, et Brandt fournit des combinaisons de formes et de matières aux beaux contrastes. Ses étuis en or décorés de laque, sont toujours de somptueuses trouvailles.
1930 : chez Arnet, etui à cigarette en argent, laques de couleur et coquille d'oeuf
1930 environ: Broche exposée au Victoria & Albert Muséum
Années 30 vente Sotheby's
1930 Platine Laque et diamants
1930 Revue Art et décoration
1930 Art & Décoration
1931 modèles Templier, photo germaine Krull
1931 étui à cigarettes vendu par la maison Sotheby's
1932 Revue Renaissance de l'Art
1932 Revue Renaissance de l'Art
1932 Revue Renaissance de l Art
1932 Revue Renaissance de l'Art
1933
1934: Archives commerciale de France
Dessin de Raymond Templier avec la photo dans la presse ci-dessous, ce dessin par un don manuel de 1967 se trouve à l'heure actuelle dans les collections du Musée des Arts décoratifs
1934 Même collier dans la presse
L'EXPOSITION DE L'UNION DES ARTISTES MODERNES AU SALON DE LA LUMIÈRE en 1935
Au Salon de la lumière, l'Union les artistes modernes a constitué une petite exposition dans la grande, effort que l'on ne saurait passer sous silence. Dans ce Salon à l'élaboration duquel a présidé, avec tant « le goût, et une vision si nette des besoins actuels, l'excellent peintre qu'est Marcel Roche, les recherches de ce groupe apportent une note particulière dont nous voudrions dégager d'abord la qualité et le caractère.
Je crois qu'il serait assez exact de dire qu'à l'imagination poétique, à la féerie du rêve, à la volonté d'élargir le domaine « l'art, dont témoignent la plupart des exposants, les artistes modernes ajoutent un souci particulier de belle technique traduisant leurs idées et une préoccupation d'écarter de leurs inventions celles qui n'auraient pas une utilité pratique évidente. Ce faisant, ils peuvent naturellement se tromper. Car, on l'a dit, tout ce qui est nouveau n'est pas beau et tout ce qui est beau n'est pas toujours nouveau. Mais ce qui est plus certain, c'est que dans le domaine de l'éclairage électrique il y a encore tant de possibilités à peine entrevues, qu'il faut chercher d'abord la nouveauté. Si celle-ci, reposant sur une technique impeccable et correspondant à des besoins profonds, n'est pas belle ou ne nous séduit pas de prime abord, qu'importe !
Elle prépare une beauté future que seuls ne découvriront jamais ceux qui se bornent à rajeunir d'antiques routines, préférant en quelque sorte un vieux visage adroitement maquillé à la fraîcheur sans fard d'une jeune beauté.
Au premier groupe se rattachent les envois de Pingusson. Par un jeu habile des diverses sources lumineuses, il arrive à des effets d'ombres colorées qui paraissent inexplicables. C'est ainsi qu'un objet éclairé par en bas projette, non pas en hauteur, mais vers le foyer lumineux, une ombre inattendue. L'application du système à la réclame lumineuse peut conduire à mille applications.
Robert Mallet-Stevens propose, pour l'exposition de 1937, un jeu de ballons aériens luminescents.
HERBST et TEMPLIER
Bracelet metal traversant une plaque de verre Raymond Templier imagine la présentation en vitrine d'un bijou fixé sur une sphère lumineuse mobile et cette sphère, avançant et reculant, traverse des zones alternées d'ombre et de lumière laites pour mettre en valeur toutes les qualités du bijou. Association du mouvement à l'éclairage si fréquente en ce Salon et qui multiplie les effets. En collaboration cette fois avec René Herbst. Templier nous montre encore une enseigne de bijoutier d'une solide construction et d'une éloquence évidente.
1935 Bracelet platine diamants: http www.templier.fr
1935
« Un peuple se confesse, même sans le vouloir, en son art, tout comme en sa littérature, en ses remous politiques, en ses tendances morales. » Cette phrase de M. Alphonse Roux, dans son livre sur Les Tissus d'art paru, il y a quelques mois, dans « la Collection des Collectionneurs », m'est revenue à l'esprit devant les bijoux de Raymond Templier. Car, dans ce terme d'art, l'auteur ne comprenait pas seulement la peinture et la sculpture, il y englobait encore et surtout toutes les formes des arts appliqués. Le fauteuil sur lequel nous nous asseyons, le verre dans quoi nous buvons, l'étui d'où nous tirons nos cigarettes, les colliers et les robes que montrent nos compagnes, participent de nos habitudes et de nos pensées, traduisent nettement notre genre d'existence. Aussi M. Roux, comparant les costumes du siècle de Louis XIV avec nos vêtements du xxe siècle, concluait : « Ces costumes d'il y a deux cent cinquante ans et ces vêtements d'aujourd'hui ne sont-ils pas aussi révélateurs de deux façons de comprendre et de mener la vie qu'une tragédie de Racine ou une oraison funèbre de Bossuet mises en regard d'une pièce de Jean Sarment ou d'un livre, soit de Giraudoux, soit de Paul Morand ? »
Modèle ayant posé pour des bijoux de Raymond Templier
1935 : broche art déco par Raymond Templier, pavage de diamants, platine et or. SignéRaymond Templier vente de Christie's
Les créations de Raymond Templier dans le bijou appartiennent vraiment à notre époque, au même titre qu'un poème de Paul Valéry, qu'Une construction de Le Corbusier ou de Mallet-Stevens, qu'une toile cubiste de Braque ou de Picasso. Et même il n'est pas douteux que le cubisme trouve une application plus rationnelle dans l'art décoratif, dans un tapis ou une étoffe, que sur une toile de chevalet. Une composition cubiste obéit d'ailleurs à un ordre rigoureux, à une véritable clarté de conception, et si certaines productions de ce genre ont pu devenir pour nous des symboles de chaos et de désordre, c'est qu'elles n'étaient plus, dans l'exécution de suiveurs, qui n'en avaient pas pénétré les principes essentiels, que des formules.
1935 étonnant bracelet en platine et argent, pavé de diamants. Photo Presse
1935 : broche R Templier platine et diamants, photo presse
1935 Or et diamant
C'est un bracelet dont le motif central peut être porté en broche, R-Templier a signé ce bijou en platine et or 750/1000° aux environs de 1935 il y a env 6 carats 25 de diamants, vente récente par la maison Sotheby's.
Les pavillons de la bijouterie et de l'orfèvrerie ont été inaugurés ce matin
Les pavillons de la bijouterie, de l'orfèvrerie, du laque et de la tabletterie ont été inaugurés ce matin.
La valeur des objets exposés, qu'ont su créer tant d'habiles ouvriers et artisans, atteint plusieurs millions. Parmi eux, on peut citer Raymond Templier et Georges Fouquet.
Les splendides laques chinoises, japonaises, indochinoises de Jean Dunaud sont également dignes d'admiration : certain tableau qui représente la moisson est une œuvre remarquable. Et l'on voit également les accessoires de table et de mobilier présentés par les orfèvres, où, malheureusement, la recherche à tout prix de formes nouvelles fait parfois oublier que les plats et les couverts sont faits pour manger et que ces objets ont d'abord un usage de tous les jours.
1937, L'exposition internationale des Arts et des Techniques dans la Vie Moderne à Paris, Raymond Templier est partout, c'est peut-être un peu fastidieux de regarder la liste des participations a cette expo, mais cela permet aussi de voir d'autres noms très connus
Par exemple le président est Georges Fouquet, mais le Vice-Président est Ernest Lippman.....les montres LIP
Il est le vice-président de la classe 55, celle de la bijouterie-joaillerie, à l'exposition de 1937, il est décoré chevalier de la Légion d'honneur. Non seulement il conçoit la bague pour Yvonne, la fiancée du futur général de Gaulle, mais ce dernier, au fil du temps, le reçoit chaque année en tête à tête.
1937 : encre de chine sur papier calque
Centre Pompidou.
Exposition internationale de 1937
Exposition de 1937 ci-dessous le Dessin
Broche 1937
Bijou de Raymond Templier réalisé en 1937, que j'ai tiré d'un de mes livres "La Joaillerie" paru aux éditions du Chêne en 1942 au 16 place Vendôme. Au 16 place Vendôme était installé aussi Mr Ostertag, un grand Joaillier.
Il n'a pas eu de chance en 1940
En revanche ce dessin conservé au Arts Déco de Paris a une histoire, il a été exécuté par Marcel Percheron, dessinateur chez Templier de 1929 à
1965, d’après la photographie d’un bijou de 1937. Ce dessin a
été réalisé à la demande de Raymond Templier pour l’exposition
« Les années 25 : Art déco/Bahaus/Stijl/Esprit nouveau », Paris,
Musée des Arts décoratifs, 3 mars-16 mai 1966. Donné par Raymond
Templier au Musée des Arts décoratifs, à la suite de cette
exposition.
Les deux Templier ne sont plus là, la lessive non plus
Grand
amateur de sport, il dessina de nombreux trophées pour des
compétitions de ski, de boxe, de golf et des affiches pour la
Fédération nationale de tennis dont celles de Roland-Garros.
Raymond Templier a continué, comme beaucoup d'autres, à travailler pendant la guerre, comme nous l'avons vu plus haut, et a fabriquer des modèles très intéressants.
Il est évident qu'un pareil conflit, aussi long, de 1939 à 1945, va causer des problèmes financiers fatals pour certains créateurs, une grande partie de l'activité est arrêtée, Raymond Templier continue a dessiner des bijoux et à les mettre en fabrication, mais il n'a plus d'idées, il manque d'inspiration pour une nouveau style, un nouveau souffle et suit la tendance qui se dégage des années 1950.
Raymond Templier a continué, comme beaucoup d'autres, à travailler pendant la guerre, comme nous l'avons vu plus haut, et a fabriquer des modèles très intéressants.
Il est évident qu'un pareil conflit, aussi long, de 1939 à 1945, va causer des problèmes financiers fatals pour certains créateurs, une grande partie de l'activité est arrêtée, Raymond Templier continue a dessiner des bijoux et à les mettre en fabrication, mais il n'a plus d'idées, il manque d'inspiration pour une nouveau style, un nouveau souffle et suit la tendance qui se dégage des années 1950.
Aux environs de 1950 or jaune et rubis cette bague, est une idée, peut-être un peu lourde
Témoin ces dessins de 1953 conservés par la collection Barlach et Heuer qui en ont fait don au Musée des arts décoratifs, des oiseaux certes bien dessinés mais après le style art déco!!!
"Tandis que les formes des bijoux se sont arrondies, la presse admire toujours ses « savants enroulements », ses « volontaires dépouillements », son « graphisme linéaire ». L'article qui lui est consacré dans Mobilier et Décoration en novembre 1954 le qualifie d'« architecte du bijou ». Au Salon d'automne, par ailleurs, Raymond Templier expose régulièrement des joyaux et des trophées sportifs. C'est une autre de ses particularités, il oeuvre pour le monde du sport. Il a composé trois affiches pour la Fédération française de tennis et conçu une vingtaine de sculptures destinées à des champions. Toutes catégories : athlétisme, boxe, basket-ball, cyclisme?
Biographie extraite du catalogue "Bijou Art déco et avant-garde", Les Arts décoratifs ;
Cette broche de 1955 est un essai très réussi, mais non suivi.
Raymond Templier, par exemple dans ces dessins de 1956, est à la remorque des Mellerio, Cartier et Van Cleef et de leur style de bijoux en fils d 'or ou fils torsadés
1957
1958
En 1960 ce dessin de collier aux motifs cœurs entrelacés est en revanche très intéressant.
1963, il est dans le ton de l'ensemble des bijoux qui se fabriquent mais l'inspiration n'est plus, la grande spécialiste des années 50 et 60 Melissa Gabardi ne dit pas un mot de Raymond Templier
En 1965, Raymond Templier va prendre sa retraite. Le premier septembre, il informe ses fidèles clients, le 1 er septembre, qu'il ferme.
Son bras droit depuis trente ans Marcel Percheron doit trouver un emploi.
En 1966 une exposition a lieu intitulée "Les Années 20, Art Déco-Nauhaus, esprit nouveau " Comme nous l'avons vu plus haut Marcel Percheron va reproduire une quarantaine de dessins d'oeuvres deja exécutées dont Templier va faire don au Musée.
Raymond Templier meurt en 1968.
Aujourd’hui, la Maison est dirigée par Edouard Brunet-Templier, descendant du fondateur, formé à l’école du négoce des diamants et des pierres précieuses de couleur, mais qu’un penchant naturel a orienté rapidement vers le marché des bijoux et pierres de collection ainsi que vers l’orfèvrerie Art Déco.
http://www.templier.fr/templier-fils/
Merci pour la recherche et l'article - vraiment interessant et bien écrit
RépondreSupprimerEspérant que vous avez lu un peu du reste
RépondreSupprimerJe suis en train de lire toutes les 8 anées du blog. Merci encore, et bonnes fêtes
SupprimerMerci pour vos articles toujours très interessantes!
RépondreSupprimerSavez-vous de autres bijoux de Templier faites depuis la guerre, d'après les dessins au Musée des Arts Décoratifs? Quand je vois un foto d'un bijoux de la meme façon je me demande comme est possible les reconnaître. Probablement non est un style grandiose et apprécié en moment, mais je l'aime pourquoi il est simple et élégant et j'espère que un jour son heur viendra.
Merci!
Jean Tradent is a mistake by Christie's. The workshop was Jean Trotain. Hope that helps. Claudine
RépondreSupprimer